Zariel, incorrigible, comme d’habitude, n’a fait ni une ni deux, et hop… il a ouvert sa grande gueule. Uniquement pour votre plaisir bien sûr, et à son grand détriment.

Votre cher reporter était, certains parmi vous le savent, notoirement célèbre pour ses coups de gueule, ses oppositions diverses, qui envers l’Oracle, qui envers la Légion des Damnés, qui envers un tel ou un tel. Un Don Quichotte diraient certains, juste un casse-couilles diraient d’autres, et bref… Cette attitude me valut de nombreux séjours dans les geôles.
Or donc, la nouvelle ville ouvrait ses portes, et quelle ne fût pas ma surprise, au détour d’une de mes déambulations dans le quartier de l’agora, d’entendre un quidam hurler à qui voulait l’entendre que les XXX (auto-censure) n’étaient autres que les tristement célèbres Damnés, nantis de masques ailés dissimulant habilement leur ancienne identité.


Ayant constaté les méthodes optimales de combat de ces guerriers dans l’arène et en ayant sévèrement fait les frais, hop-hop-hop, ni une ni deux, drapé de toute ma frustration, je montai à mon tour sur le podium pour exprimer ma rancoeur.
Or, à peine avais-je entamé ma diatribe qu’un dinosaure géant sauta depuis l’arrière d’un bâtiment qui le dissimulait habilement pour atterrir à mes côtés, me ceintura et me passa une patte écailleuse sur la bouche en guise de bâillon.
Courroucé, je m’apprêtais à me débattre lorsqu’un second garant de l’ordre, un lapin carnivore d’une taille comparable à celle du dinosaure, vint à sa rescousse et me passa des menottes, tandis que le dino me maintenait fermement.
Impuissant, je me vis forcé de suivre le lapin qui me jeta férocement dans un cachot humide en déclarant : “Je réfère de ton comportement au Maître, et ton jugement sera prononcé !”
Tremblant de peur, j’attendis donc dans ma cellule durant quelques heures angoissantes, jusqu’au retour du lapin.
“Mon pauvre Zariel, me dit-il, le Maître a exprimé le souhait de te voir décapité.” Savourant ma détresse, il me laissa frissonner d’interminables secondes avant de reprendre :
“Mais moi, herbivore notoire, contrairement à ce que tu penses de mon régime alimentaire, j’ai plaidé la clémence. Aussi, tu peux sortir, mais une épée de Damoclès te suivra partout à présent, et aucun sursis ne te sera plus jamais alloué en cas de récidive.”

Voilà… Et alors que j’étais reconduit sans ménagement vers la sortie, je notai mentalement la disposition des lieux. Et je vous le dis, chers lecteurs, ces geôles de la nouvelle ville, si elles ne sont pas insalubres comme les ruines de l’ancienne, sont bâties pour constituer un séjour de courte durée. L’on y verra bientôt sur ses murs les dessins désespérés de ceux qui, moins chanceux que moi, auront laissé leur dernier message à la postérité, avant de perdre la tête sur un billot gorgé de sang, payant de leur vie une langue par trop déliée.

Telle est la loi de la nouvelle ville !

Zariel