Archive for juillet, 2008

“Elle”

Elle était épaisse maintenant. Lourde. Humide. Glaciale aussi. Tout se perdait en elle. Leurs regards ne parvenaient à la percer de plus de quelques pas. Tout proches, ils n’étaient les uns pour les autres que de sombres silhouettes se détachant en elle. Leurs torches ne la transperçaient pas, faisant à peine danser une faible teinte orangée dans ses volutes blanchâtres. Elle étouffait tout. Même les bruits étaient amoindris par sa présence. Comme s’ils avaient peur de la troubler, de la réveiller …

La réveiller …

C’était stupide, elle n’était pas vivante ! Pourtant, les hommes étaient trop étroitement regroupés, trop serrés, même alors que la crainte de s’égarer était forte. Ils se méfiaient. Ils la craignaient.

Ils en avaient peur.

Ils en étaient terrifiés …

Et pourtant, ils devaient vaincre cette peur. Ils devaient rentrer en elle. Ils devaient la traverser. Il n’avait pas le choix. Le seul chemin passait par elle. Leur chemin. Non, il ne pouvait en être autrement. S’ils avaient pu faire autrement, ils l’auraient fait. Mais elle était là, et ils ne pouvaient pu reculer.

C’était le seul chemin …

A travers ses lourds volutes et son silence. A travers son étouffante moiteur. A travers elle

La brise fraiche qui soufflait sur eux les faisaient frissonner. De froid et d’horreur. Cela ressemblait tellement à une respiration … A un souffle. Le souffle profond d’une créature gigantesque et pourtant discrète, silencieuse. Tapie… Son souffle …

Ils savaient cette peur irraisonnée. Ils savaient que tout cela était tiré de leur imaginaire. Ils l’avaient déjà traversée tant de fois auparavant, sans d’autres craintes que celle de se perdre. Pourtant, aujourd’hui, c’était différent. Pourquoi était-ce différent ? Tout était pourtant pareil à leurs souvenirs.

Elle n’était pas plus épaisse qu’avant, ni plus lourde, ni même plus froide. Et elle avait toujours été aussi blanche de par le passé. Mais elle était différente aujourd’hui. En tout point semblable au passé, mais aussi tout autre. Immense et terrifiante.

Terrible.

Non, rien n’était comme avant. C’était bien différent …

Ils le comprirent.

Une torche s’éteignit. Un cri brisa le lourd silence, assourdi par sa présence, bientôt tu.

Elle avalait tout. Même les bruits…

Un autre brasero arrêta de brûler dans un nouvel éclat de voix sourd.

Puis un autre.

Et encore un autre.

Bientôt le silence retomba pour toujours sur elle.

En elle.

La Brume …

Terrible et silencieuse …

Ils l’avaient compris trop tard …

Le Minotaure Mégalo

Cette semaine à l’agora, une pièce d’une finesse redoutable, une véritable satyre sociale sur les débordements de l’ego.

A ne rater sous aucun prétexte.

Voir la BA (bande annonce^^) :
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Le minotaure et le canari

Il est debout dans l’arène depuis de trop longues heures. La nuit a été sanglante, une fois de plus, et peu de ses compagnons ont survécu aux assauts successifs de ces hordes d’ennemis aux mille blasons. Le souffle issu de son mufle crée des volutes blanches dans la bruine matinale, qui vont en s’étiolant au sein de ce tissu diaphane et grisâtre qui est l’apanage de l’aube. Il a froid, et il a mal, les muscles raidis dans ce calme qui, tous ses compagnons le ressentent avec lui, précède la tempête. La tête de son maul repose sur la terre, soulageant provisoirement ses bras de titans. Son armure de cuir aux clous noirs ne tient plus que par la grâce de quelques lanières décharnées. Sur sa peau, le sang a séché par plaques, dessinant des tâches brunes aux motifs oniriques. Distraitement, le minotaure extrait de sa gueule une épaisse langue bovine, pour la propulser par réflexe au cœur de son naseau droit, duquel il aspire une quantité importante de morve, fluide et translucide comme sa vie d’esclave.

Et puis ils sont là.

Un humain aux yeux tirés jaillit comme un diable de derrière un arbre, et court en tenant droit devant lui un no-dachi immaculé, signe d’une fraîcheur physique certaine. Trois ratlings bondissent simultanément de la fenêtre brisée d’un bâtiment en ruine et foncent vers eux en couinant, agitant au-dessus de leur tête des armes tourbillonnantes. Un orc est sur leurs talons, ralenti par son armure gothique qui lui confère une allure démoniaque dans le flou de la brume. Et tant d’autres encore…

Le minotaure est le dernier à résister, quand tous ses amis, ses frères d’armes, gisent autour de lui dans des mares de sang fumant. Il meugle de toute la puissance de sa cage thoracique un ultime cri de défi, s’apprêtant à tomber à son tour. L’elfe qui se tenait devant lui gardera longtemps imprimé sur sa peau translucide un motif de mailles, comprimées sur sa peau par le terrible maul avant que la moitié de ses côtes n’explosent sous l’impact de la tête en fonte.
Allongé sur le dos, ses yeux jaunis, injectés de sang, fixent un court instant le monstre cornu qui l’a abattu d’un unique coup. Ils expriment un mélange de souffrance, d’admiration et de respect, de crainte, de peur… puis ils se ferment. Mais le minotaure ne lui a pas rendu son regard, non. Il a plutôt brisé une mâchoire naine, fait éclater la rate d’un écailleux bipède, et démoli, dans l’élan de son coup tournoyant, la rotule d’un adversaire dont il n’a même pas vu les traits.

C’est alors qu’un légionnaire rédempteur, de sa lance lui a transpercé le foie. Le minotaure divague, son esprit vagabonde alors que son arme lui glisse des mains, et qu’il pose un genou au sol. Amusant, pense-t-il… car il se rappelle une histoire qu’on lui a racontée, un jour, au sujet d’un messie, ou d’un fils de dieu, dans un autre univers, qui est mort de la sorte, sur une croix. Cela le fait sourire, son rictus découvrant une rangée de dents rougies par la salive sanguine qui lui coule des gencives. Et il s’écroule, face contre terre.

Il n’a pas eu droit, cette fois, aux cent coups de fouet que lui inflige régulièrement son maître. Et même, il s’est éveillé dans le centre de convalescence, habituellement dévolu aux gladiateurs plus précieux, les elfes et les ratlings, qui n’ont pas non plus la même constitution que lui, qui guérissent plus lentement. Mais le centre n’est pas vraiment une récompense, c’est plutôt un calcul du maître, estimant que son fauve est prêt pour un entraînement supplémentaire à l’usage du maul.

Sortant du quartier de soins, il arrache ses derniers pansements, encore imprégnés de l’odeur entêtante du baume cicatrisant à l’eucalyptus. Il doit se rendre à l’entraînement, mais d’abord… Mais d’abord, le Chi-Chi !

Le Chi-Chi, c’est comme ça qu’il a baptisé son canari. Ce pauvre petit oisillon, qu’il a ramassé par terre quelques semaines auparavant, sans doute tombé du toit, s’était cassé l’aile. (Et petit oiseau si tu n’as pas d’ailes… oh tu peux pas voler, non). Il l’a soigné avec tendresse, lui a construit une attelle avec quelques brindilles et de ténues ficelles, prenant mille précautions pour ne pas écraser de ses doigts patauds la frêle boulette de plumes jaunes. L’oiseau le lui a bien rendu, chantant depuis ce jour de douces mélopées aux accords complexes et flûtés. Les trilles du Chi-Chi rassérènent le triste cœur du minotaure captif.

Mais justement… Lorsque l’aile a commencé à guérir, pour ne pas que le canari s’envole vers d’autres cieux, le bovidé lui a construit une cage en osier. Tout confort certes, mais une cage malgré tout, une prison dorée. Et lorsqu’il regarde ce petit être emplumé battre frénétiquement des ailes en quête de liberté, notre minotaure a un pincement au cœur. Il est comme lui, cet oisillon, il ne comprend pas pourquoi on l’a capturé… Il lui rappelle ce jour où les chasseurs ont déboulé dans la plaine en sonnant du cor, à dos de cheval, porteurs de piques longues, et comment ils ont aiguillonné l’ensemble de sa tribu, dans l’effroi le plus total, les capturant lui et les siens, les uns après les autres. Très jeune à cette époque, le minotaure en garde un souvenir traumatisant, qui lui occasionne presque toutes les nuits des cauchemars atroces, le réveillant en sursaut, pétri d’angoisse, baigné par une sueur glacée.

Le canari est son ami, son seul ami dans cette cité hostile, mais il en a fait un prisonnier à son tour, et cela il ne peut pas se le pardonner. Alors il se dit qu’il va le libérer, là tout de suite, et puis il renonce car son absence lui retirerait la seule chaleur qu’il soit encore capable de ressentir. Il se promet qu’il ne le gardera qu’un jour ou deux encore, pas plus, juste pour profiter de sa présence désintéressée, de sa musique, de son innocence, juste un jour ou deux, pas plus, encore un peu…

Le minotaure ferme la porte de sa cellule en soupirant, se retourne et marche d’un pas lourd vers la salle d’entraînement. Dans son dos, la musique le poursuit, décroissant en volume à mesure qu’il avance. Il la distancie. Puis ça y est, il ne l’entend plus, le chant de son canari.

Le minotaure essuie du revers de son bras la larme qui vient de poindre au coin de son œil.

Comedia del Arte

Cette semaine à l’amphithéâtre, une pièce intimiste qui a pour titre “du Rififi à la Cité”.

La critique de Zariel : servie par des acteurs talentueux, cette comédie de boulevard fera le bonheur de la famille. Succès de l’été garanti !

Voir la BA : http://www.grapheine.com/bombaytv/index.php?module=see〈=fr&code=6d8212fa2e549ccbae9a0cdc9f2c36c3

Où les pirates ne sont pas ceux qu’on croit(v1)

Par Beauté Fatale.

La bataille navale fait rage. La tension est à son comble. Que va-t-il dire ? ” E8 ! ” Silence de plomb. ” Touché ! Merde ! G2 ? ” Et oui, amis lecteurs, nous sommes bien en pleine mer. L’ennui y est tel (pensez, 10 cycles sans ennemi !), que la bataille navale ne se fait même plus à coups de canon. Mais que se passe-t-il donc ?

L’Engeance de Maât a envahi l’arène dite ” bataille navale ” et nul ennemi a l’horizon. Des pirates qui ont fait escale dans la région, nulle nouvelle. Bref, calme plat. Ah, comme nous regrettons le temps béni des romains, où les combats de galères étaient bel et bien réels ! Aujourd’hui, voilà les fiers combattants résignés à attendre la fin de leurs cycles comme ils le peuvent. Attention toutefois : en manque de proies, ils n’hésitent pas à achever le premier venu. Un de mes camarades en a fait l’amère expérience.

Interview de Persévérance, gladiatrice courageuse :

BF : Alors, persévérance, que s’est-il exactement passé ?
P : Eh bien… en fait je… je passais leur faire un p’tit coucou et… (NDLR : elle éclate en sanglots et est prise de tremblements)
BF : Et ?
P : Un mi… minotaure avec… de grosses cornes ! Et… je… AAAAH MAMAN !

Il en ressort que les minotaures sont cruels. Bref, méfiez-vous d’eux ! Sur ce, je vais lire les épisodes de l’engeance sur la mer. Et oui ! Ils ont transformé un navire en imprimerie et vendent désormais de petits strips sur leurs aventures. Commerce quand tu nous tiens…

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